Jérémy André est reporter au journal « Le Point ». Il est co-auteur d’un livre manifeste « Israël, 7 octobre 2023, Un pogrom au XXIe siècle ». Sans commentaire. Il est également l’auteur en 2023 d’un ouvrage complotiste sur la Covid sur le mode du discours des services des USA. Le titre : « Au nom de la science » Covid 19 Qui nous a menti ? ». Réponse « les Chinois sont coupables…
Il m’adresse une série de questions sur mes relations avec les Chinois. Je ne comptais d’abord pas y répondre. En effet, une campagne a été déclenchée contre LFI sur le thème de la Chine. Toute une équipe s’est mise en mouvement, peut-être sur le modèle de l’entretien de bonne compagnie observé récemment avec les amis du PS dans certains médias. En tout cas, cette équipe se partage visiblement ses éléments de langage et les répète chacun dans son média. « À quoi bon, me suis-je dit. Il s’agit d’une campagne de diabolisation de plus. Très ordinaire. J’en ai vu des aspects à la télé et par écrit dans « Le Monde » et divers sous-traitants ». Ce sont toujours les mêmes. Ils ont déjà mené de concert l’opération « La Meute ». Mais j’ai lu ces questions ! Partagé entre l’envie de rire et l’étonnement d’y trouver un tel ramassis d’erreurs et de propagande aveuglée, j’ai choisi au contraire de partager avec tout le monde. Je publie donc sur mon blog ses questions et mes réponses. Au passage, vous découvrez sur quel ton ce genre de personnage s’adresse aux insoumis. Comme s’il était sous son uniforme et investi de je ne sais quelle arrogante autorité ! On se croirait dans un commissariat en train d’expliquer l’histoire de la Palestine et du droit international après une accusation « d’apologie du terrorisme ».
« Bonjour,
Journaliste au service international du Point, je termine un article sur les relations entre Jean-Luc Mélenchon et la Chine. Cette longue recherche m’a conduit à retrouver de nombreux documents et témoins, depuis sa jeunesse jusqu’à aujourd’hui, en passant évidemment par les 2 voyages qu’il a effectués en juin et décembre 2001 comme ministre délégué à l’enseignement professionnel.
Pour compléter mon article, je souhaiterais adresser une série de questions à Monsieur Mélenchon. Pourriez-vous les lui transmettre ?
L’article paraîtra cette semaine dans l’hebdomadaire, où il devrait recevoir une place importante. Nous bouclons mardi après-midi, et avons donc besoin des réponses d’ici mardi 10 h dernier délai, pour pouvoir les intégrer et faire des corrections si nécessaires. Des réponses écrites peuvent suffire, mais je suis aussi très intéressé d’échanger par téléphone ou en direct demain si besoin.
Voilà mes différentes questions :
• D’après nos recherches, les voyages de Monsieur Mélenchon ont été organisés à la DRIC par une chargée de mission, Madame Chen Huiling, décrite comme très proche de l’ambassade de Chine et du PCC, et ayant permis d’organiser des rencontres avec des officiels de très haut rang, au-dessus du niveau des homologues du ministre délégué. Monsieur Mélenchon a-t-il maintenu le contact avec Madame Chen Huiling après ces voyages ?
Réponse 1 : Vous prenez la responsabilité de qualifier politiquement un agent de l’État mis à la disposition du ministre que j’étais par l’administration centrale de notre pays. Au total, une dizaine de fonctionnaires ont participé à la préparation de mes deux voyages en Chine.
Il s’agissait d’engager la renégociation de l’accord de coopération de l’éducation nationale avec nos homologues chinois. Cet accord était resté caduc depuis plus d’une décennie. J’ai mené à bien cette négociation puisque cet accord a été entièrement redéfini et conclu en huit mois, et signé à Paris par le ministre Jack Lang et la ministre chinoise de l’éducation est venue spécialement à cet effet. Il est considéré comme une réussite remarquable compte tenu du délai et de l’amplitude de son contenu.
• Lors du second voyage de décembre 2001, Monsieur Mélenchon a démarché le vice-maire de Canton au nom de Monsieur Dassault et Monsieur Decaux. En quoi cette démarche relevait-elle de ses fonctions de Ministre délégué et quelles en ont été les suites ?
Réponse 2 : Je n’ai jamais « démarché » personne, car j’étais dans ma fonction de ministre. Les agents de renseignements étrangers qui vous ont raconté mes discussions n’écoutaient pas assez bien aux portes. Car j’ai également fait une intense propagande pour vanter les mérites de notre TGV en opposition au train allemand qui se trouvait être en compétition avec l’offre française. En tant que ministre, partout où je suis allé, j’ai toujours systématiquement fait campagne pour les offres industrielles françaises après avoir demandé sur ce point une feuille de route pour chaque déplacement. Il est curieux que vous ne sachiez à ce point rien des habitudes ministérielles françaises dans ce domaine.
• Lors du second voyage, en décembre 2001, Monsieur Mélenchon a rencontré le premier secrétaire du PCC à Wuhan, Monsieur Yu Zhengsheng, futur membre du bureau politique (à partir de 2002) puis de son comité permanent (2012-2022). Monsieur Mélenchon a-t-il été en contact direct ou indirect avec Monsieur Yu depuis 2001, en particulier lors de sa visite à Paris en 2011 ?
Réponse 3 : J’ai rencontré à Wuhan tous les officiels de cette région. Je m’y rendais pour visiter l’usine Peugeot qui s’y trouvait et discuter des conditions de l’apprentissage du personnel qui assemblait les voitures. La province est historiquement celle où les Français sont actifs et développent une influence culturelle. Vous apprendrez que l’usage et la politesse ne permettent pas à un ministre français de trier les hôtes qui le reçoivent. D’ailleurs, je n’en ai jamais eu l’intention. Votre complotisme plein du mépris anti-chinois qui vous obsède vous égare. Vous ne comprenez visiblement rien à ce qu’est la stratégie de la diplomatie française. Vous m’apprenez que monsieur Yu Zhengsheng était à Paris en 2011. Je ne l’ai pas su.
• Monsieur Mélenchon a-t-il eu des contacts directs ou indirects avec Madame Chen Zhili après avoir été ministre, et en particulier quand elle était vice-présidente du comité d’organisation des JO de Pékin de 2008, à la veille desquels il s’est opposé aux appels au boycott ?
Réponse 4 : Madame Chen Zhili est une ingénieure brillante de la RPC et une dirigeante politique de très haut niveau. Elle était mon homologue en matière d’enseignement professionnel. Elle a beaucoup enseigné en France. Je vous l’apprends ? J’ai noué avec elle, au fil des négociations, des relations amicales. Le ministère de l’Éducation nationale l’a invité à également à une visite de Paris en péniche et même une visite à Marseille du château d’If. Sans oublier la découverte des Arts et Métiers alors tout juste rouverts après rénovation. Comment avez-vous pu ignorer tout cela ? Même pour le complotisme, il faut un certain professionnalisme.
Malheureusement, je n’ai pu maintenir de contact avec Madame Chen Zi Li après mon ministère, et notamment pas pendant la période des Jeux Olympiques. Je le regrette profondément, car j’ai une très haute estime de son intelligence clairvoyante. Nous avons eu une longue discussion pendant les trois heures de TGV en direction de Marseille sur les questions d’indépendance, de souveraineté nationale et de non-alignement. Il est regrettable que votre enquête ne vous ait pas permis de connaître ces trois heures d’isolement studieux. Nos complots vous sont donc inconnus. Une enquête s’impose !
Quoi qu’il en soit, je suis très heureux d’avoir défendu l’honneur de mon unique passeport en soutenant les athlètes chinois invités à Paris. Ils avaient été honteusement maltraités avec l’appui de personnages comme monsieur Robert Ménard qui s’était notamment installé dans les tours de Notre Dame pour soutenir le Dalaï-lama comme c’était la mode à l’époque.
• Quelle signification est donnée par Monsieur Mélenchon aux vestes Zhongshan (gris anthracite à col Mao, sur le modèle des costumes portés par les dirigeants de la RPC, depuis le Président Mao jusqu’à Xi Jinping) qu’il a régulièrement arborés en meeting durant certaines campagnes électorales ? Est-ce que cela exprime une proximité idéologique avec la RPC ? Que répondre à ceux qui associent ces costumes aux excès de certaines périodes de l’histoire de la République populaire de Chine, comme la Révolution culturelle, le Grand bond en avant ou les massacres de la place Tiananmen du 4 juin 1789 ?
Réponse 5 : Je laisse sans réponse une question dont l’absurdité m’a laissé sans voix. Le niveau de la polémique peut-il tomber intellectuellement plus bas ? Cependant, je suis heureux de connaître désormais le nom de ma veste. J’ai le plaisir de vous dire que l’occasion de ruminer vos obsessions vous sera de nouveau offerte, car j’ai l’intention de porter encore ce vêtement, d’ailleurs en vente libre à Paris. Vous aurez soin de ne pas la confondre avec la veste de mon « abacost » congolais qui est très ressemblante. N’oubliez pas de me dire quel sens je dois désormais donner à vous voir en costume cravate comme Poutine, Orban et Trump. Et souvent Xi Jinping lui-même.
• Sur Taiwan, Monsieur Mélenchon sait évidemment que l’île n’a jamais été contrôlée par la République populaire de Chine, qu’elle a été une province chinoise 10 ans seulement à la fin du XIXe siècle, soit bien moins que l’Algérie française, et que la France puis l’Assemblée générale de l’ONU (dans la résolution 2758) ont bien veillé à ne pas spécifiquement reconnaitre la souveraineté chinoise sur l’île en reconnaissant la Chine communiste, compromis établi pour laisser en suspens l’avenir de l’État issu de la « République de Chine » établi dans l’ancienne Formose par Chiang Kai-chek après sa défaite sur le continent. La position exprimée en aout 2022 – affirmant que Taïwan est une partie intégrante du territoire de la RPC – indique-t-elle que Monsieur Mélenchon souhaite faire évoluer la position diplomatique de la France sur Taïwan, pour mettre fin à l’ambiguïté maintenue par les chefs de l’État français depuis le Général de Gaulle ?
Réponse 6 : Encore un effet de votre ignorance et de vos obsessions. Aucun document ne pouvait faire référence à Taïwan ! La question ne se posait pas concernant un territoire dont la France puis l’ONU ont reconnu l’existence telle qu’il se définissait lui-même. Ces frontières de la Chine sont celles reconnues par le général de Gaulle depuis 1964 et par l’ONU depuis l’inclusion de la RPC au conseil de sécurité et l’expulsion des « représentants » Kouo-Min-Tang de Taïwan. Elles incluent l’île qui était appelée à l’époque « Formose ». « L’ambiguïté stratégique » n’est pas un concept de la diplomatie française sur ce sujet. C’est une position de vos amis dans l’administration américaine. Vous ne devriez pas recopier ses arguments sans les vérifier sous l’angle français. Pour mieux comprendre ma position, je vous invite à écouter mon discours sur le sujet à la tribune de l’Assemblée nationale. Je vous le résume : conformément à la position constante de la France et de l’ONU, il n’y a qu’une seule Chine dont la capitale est Pékin. Et la solution des questions sur ce sujet ne peut venir que du dialogue entre chinois, sans ingérence étrangère. Je suis donc hostile à la guerre que préparent les États-Unis d’Amérique dans la zone Asie pacifique. Je l’ai exposé au cours de nombreux discours récents et pour la première fois publiquement sur l’île de la Réunion dans un meeting il y a deux ans. Hélas, les provocations de l’équipe Trump se multiplient sur place. À leur suite, de nombreux relais d’opinions des USA s’agitent en effet pour trouver des prétextes à disputes et préparer les esprits par la propagande la guerre. Apprenez donc que le moment venu, en cas de conflit, je m’opposerai à toute agression contre la RPC et le peuple chinois.
• L’essayiste Maxime Vivas décrit Monsieur Mélenchon comme un « ami personnel de longue date ». Cette description est-elle correcte et partagée ? Comment se sont-ils connus et entretiennent-ils des contacts réguliers ?
Réponse 7 : Mes relations personnelles ne sont pas à la disposition de vos inquisitions. Pour les fables empoisonnées, voyez vos collègues plus directement spécialisés dans cet exercice. Par exemple le journal « Libération » qui a déjà pris en charge de longs récits diffamant contre les insoumis. Cet ancien journal maoïste est aujourd’hui dirigé par un autocrate discuté par sa propre rédaction, monsieur Dov Alfon. Comme il s’agit d’un ancien agent du service de renseignement de l’armée israélienne et qu’il assimile cette activité à celle de journaliste, cela vous unira par une conception commune de votre métier. Elle vous facilitera le contact.
• Monsieur Mélenchon confie dans une récente interview une conversation avec un dirigeant chinois. Qui est-ce ? Quand a-t-elle eu lieu ? Où cela ? S’agit-il de Zhang Guangping, directeur pour l’Europe de l’Ouest au département international du Parti, en marge de sa visite du 6 mars 2025 à l’Assemblée nationale ?
Réponse 8 : Je vous réponds pour soulager votre anxiété. Non, il ne s’agit pas de monsieur Zhang Guangping. N’importe quel service de renseignement français ou étranger vous apprendra, comme je l’ai déjà dit tant de fois, qu’il s’agissait du précédent ambassadeur de Chine en France. Il est désormais l’actuel ministre de la RPC pour les relations avec l’Europe. Je rencontre en effet souvent des ambassadeurs de divers pays. Surtout ces temps-ci. Car nombre d’entre eux sont interloqués par l’évolution raciste, islamophobe, pro génocide, et néo-conservatrice de nombre des médias de notre pays. Hélas, je ne peux les rassurer. Pour le présent, je vous informe que j’éprouve une vive sympathie pour l’actuel ambassadeur de Chine en France. En effet, c’est un fin connaisseur de notre langue et des coutumes de notre pays après avoir été un ambassadeur remarqué en Algérie.
Conclusion du complotiste inquisiteur : « Je suis disponible d’ici demain pour un échange par téléphone avec vous si besoin, pour toute question sur le format de la publication ou mon projet et mes recherches.
En vous remerciant par avance,
Cordialement, Jérémy André
Réponse 9 : En français, « cordialement » est une formule affective. Je vous serai reconnaissant de vous en tenir à un mode moins familier.